IT WAS FOR ELISE

I did this reportage on my own, with my camera on my shoulder, for a strictly personal reason: my daughter was still very young, and I didn't like the way the government was already talking to her. The idea was to record everything, as I was unaccustomed to demonstrations, and I quickly perceived the informative and emotional density of the images and sounds I was gathering, and I knew right away that I wouldn't interfere in post-production. With the exception of the editing itself, there would be no commentary or narration of any kind, given the eloquence of the events. I was surprised by the violence of the shocks at times. Particularly when I had to crouch on the ground to protect my camera from a sudden charge of CRS at my back, which immediately turned into a doormat. Anger and disgust, then, were the feelings I stored up along with the rushes. Disgust at all this duplicity which, in the middle of the street, beyond the primordial quest for anonymity, exploits deceptive appearances to bring down the adversary.

Between recreation, entertainment, stupefaction, exploitation of man by man, of the planet by man, of man by war on the one hand, and also media of anticipation in the first sense (knowledge is acting), divination, spiritism, a true act of faith, a solid proof of love, an instrument of philosophical reflection, an introspective arsenal or a factor of real progress through the transmission of knowledge and the elevation of the level of consciousness that it allows, the possibilities of cinema are more than immense, in reality infinite as it is also the case for any form of art, but from Andreï Tarkovski to Leni Riefenstahl via Cocteau, Besson and Dupontel, comes a time when it is necessary to (really) choose.

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J'ai mené ce reportage en solo caméra à l'épaule d'abord motivé par une raison strictement personnelle : ma fille était encore très jeune et je n'aimais pas beaucoup comme le gouvernement lui parlait déjà. Il s'agissait de tout enregistrer, car peu habitué aux manifs j'ai vite perçu sur site la densité informative autant qu'émotionnelle des images et des sons que je récoltais, et j'ai tout-de-suite su que je n'interférerais pas en postproduction. Exception faite du montage proprement dit, il n'y aurait, eu égard à la suffisante éloquence des événements, pas d'ajout de commentaire ou d'une quelconque narration. Je fus surpris de la violence des chocs, parfois. En particulier lorsque je dus m'accroupir au sol pour protéger ma caméra d'une charge de CRS survenue brusquement dans mon dos, qui se transforma aussitôt en paillasson. Colère et dégoût, donc, furent les sentiments que j'emmagasinai en même temps que les rushs. Dégoût de toute cette duplicité qui, en pleine rue, au-delà de la recherche primordiale d'anonymat, exploite les apparences trompeuses pour abattre l'adversaire.

Entre récréation, divertissement, abrutissement, exploitation de l'homme par l'homme, de la planète par l'homme, de l'homme par la guerre d'une part, et par ailleurs média d'anticipation au sens premier (savoir est agir), support de divination, de spiritisme, véritable acte de foi, solide preuve d'amour, instrument de réflexion philosophique, arsenal introspectif ou encore facteur de réel progrès par la transmission du savoir et l'élévation du niveau de conscience qu'il permet, les possibilités du cinéma sont plus qu'immenses, en réalité infinies comme c'est d'ailleurs le cas pour toute forme d'art, mais d'Andreï Tarkovski à Leni Riefenstahl en passant par Cocteau, Besson et Dupontel, vient un moment où il faut (vraiment) choisir.

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