Experiencing Interruptions?

Interlune

Il s'agit d'une installation vidéographique expérimentale, artistique, poétique et composite. Discrépance s'organise sous la forme d'une unique projection immersive et fonctionne en boucle.
Ce travail s'établit sur la base de la triangulation du son du texte et de l'image. Il ne contient pas les éléments déclenchants d'un début ou d'une fin. Dépourvu de générique, il est réalisé à partir d'archives personnelles, d'épisodes enregistrés, filmés, capturés, depuis plusieurs années. Alors que la caméra enregistre ce qu'on lui impose de composer, la mémoire sélectionne, modifie, est soumise aux affects, aux troubles, à la pression intérieure des émotions diverses, refoulées ou non. L'œil de la caméra, ainsi que le mien, l'un qui enregistre sans conditions, non soumis à la physiologie, omniscient, et l'autre condamné à effacer, oublier, transformer, réinterpréter. L'association des deux regards permet un équilibre précaire pour la lecture de ces souvenirs et pour leur enregistrement dans la mémoire.
Ces images sont tirées de mon quotidien. Ce travail s'inscrit dans le mouvement de la mobilographie, elles laissent apparaître le dynamisme des scènes, sans tenter de réduire le bruit d'une image ou de la stabiliser, laissant apparaître volontairement ma présence en tant qu'humain appareillé sur l'image filmée.
Ce travail, en plus des images autobiographiques, contient des enregistrements personnels, des archives du passé, un extrait de discussion, un poème lu. Associés à d'autres souvenirs vécus par l'image, ils fournissent ainsi une narration testimoniale fragmentaire et réagencée.
La musique est le catalyseur du projet, permettant d'instaurer une ambiance ; il fictionnalise, il permet la narration des images et du texte ensemble et instaure une émotion première au travail. Ces musiques sont toutes issues de compositions personnelles travaillées indépendamment du montage. Chaque image se cadence en fonction de la musique.
Par sa diffusion, ce travail a pour but de dépasser le journal vidéo personnel et émotionnel qui n'aurait de sens qu'au regard de ma propre mémoire. Mon ambition est d'étirer la notion du privé pour la rendre publique ; l'étoffe même qui habille mon travail est l'idée d'un partage du sensible.
Le souvenir privé diffusé prend finalement toujours sa place chez l'autre. Ce qui habite ce travail, de la capture des images, à sa diffusion est le couple notionnel intime/extime. L'intime et l'extime évoquent la dimension de soi qui se situe dans l'autre ; filmer, enregistrer, un fragment de son soi intime, tels ses proches, sa famille et proposer cette prise de vue au regard en tant qu'œuvre interroge le couple notionnel. D'une part, les personnes filmées sont ces autres, proches, intimes justement, chez qui une partie de l'intimité du créateur est disséminée à l'intérieur d'eux. En les filmant, il dévoile sa partie intime qui persiste dans l'autre. D'autre part, le spectateur de la vidéo, celui qui la regarde en tant qu'œuvre, est pris lui aussi dans une logique extime, l'intime d'un autre convoquant chez lui sa propre intimité, faisant émerger des souvenirs, des émotions, comme si cet intime lui appartenait. Enfin, proposer au regard des fragments de son intime recèle d'une prise de risque pour le créateur, inséparable d'un désir de se rencontrer soi à travers l'autre, dans l'avis du spectateur, dans sa validation. La présence de l'autre, en tant que spectateur, est un intermédiaire entre soi et soi, de même titre que le psychanalyste, aussi, est un autre que l'on consulte pour se rencontrer soi à travers lui.

  • Rose Beaudoin
    Director
  • Project Title (Original Language):
    Interlune
  • Project Type:
    Experimental
  • Runtime:
    7 minutes 21 seconds
  • Completion Date:
    December 1, 2024
  • Country of Origin:
    France
  • Country of Filming:
    France
  • Language:
    French
  • Film Color:
    Color
  • First-time Filmmaker:
    No
  • Student Project:
    No
Director - Rose Beaudoin